Verbatim de la conférence de presse du 4 juin 2024 de Me Louis CAILLIEZ, avocat du commissaire de police Grégoire CHASSAING, dans le cadre de l’affaire du décès de Steve MAIA CANICO à Nantes
« Merci beaucoup d’avoir fait le déplacement pour cette conférence de presse qui me permet de mutualiser mes réponses à vos différentes sollicitations.
Quelques mots importants, donc, dans l’intérêt et au nom du commissaire divisionnaire de police Grégoire CHASSAING, que j’ai l’honneur de défendre et dont je me fais le porte-voix, et qui est injustement accusé d’avoir causé la mort de Monsieur Steve MAIA CANICO le 22 juin 2019 à Nantes lors de la fête de la Musique.
Après un tel drame, il est évident que la Justice doit passer ; et elle passera dès la semaine prochaine au sein du Tribunal correctionnel de Rennes.
Grégoire Chassaing ne s’exprimera pas d’ici-là puisqu’il réserve bien évidemment sa parole aux parties civiles, au Procureur et aux juges dans l’enceinte judiciaire.
Mais j’ai pour ma part le devoir impérieux de répondre aux contre-vérités diffusées dans tous les médias depuis 5 ans au mépris du secret de l’instruction, et surtout en piétinant la présomption d’innocence de mon client sans s’embarrasser d’une étude complète et honnête du dossier. C’est la raison de cette conférence de presse.
Avant toute chose, il doit être rappelé que le décès par noyade dans la Loire de Monsieur Steve MAIA CANICO est un accident, un accident tragique qui n’a été voulu par personne.
La question qui se pose est donc de savoir si la Justice peut dire – sur la base des éléments de preuve réunis au cours de l’instruction – si cet accident a pour cause indirecte une faute caractérisée de Grégoire CHASSAING.
La réponse est non.
Après des années d’enquête extrêmement approfondie pour comprendre les circonstances de l’accident mortel de Steve MAIA CANICO, l’explication la plus crédible, la plus probable et la plus sérieuse, qui se fonde sur de très nombreux éléments fiables et concordants du dossier, est celle d’une chute en Loire fortuite, par inadvertance, du simple fait de la configuration intrinsèquement dangereuse des lieux, et sans aucun rapport avec la police.
En effet, quelques minutes seulement avant sa chute en Loire qui intervient précisément à 4 heures 33 minutes et 14 secondes, Steve MAIA CANICO dormait profondément à 1 mètre du bord du quai Wilson, qui n’était ni barriéré ni éclairé, à un endroit à peu près dans l’axe de la rue de Guyane, à côté du parking sous la grue grise et en tout cas loin du bunker où la soirée a dégénéré. Il ressort du dossier que Steve MAIA CANICO ne s’est pas éloigné de cet endroit éminemment dangereux où il dormait. Un témoin l’a d’ailleurs vu déraper, trébucher sur le bord du quai, et tomber à l’eau à ce même endroit. ll ressort également du dossier que Steve MAIA CANICO n’a pas pu être affecté par du gaz lacrymogène et qu’il est tombé indépendamment de tout facteur contributif de nature policière, comme d’ailleurs 5 autres personnes avant lui au cours de l’heure qui précédait (entre 3h13 et 4h17), dont 1 teuffeur un quart d’heure avant Steve, ces chutes étant toutes complètement décorrélées de toute action policière.
Donc en dehors d’une simple concomitance temporelle, aucun lien causal ne relie la chute accidentelle de Steve MAIA CANICO à la personne de Grégoire CHASSAING, qui est victime d’une mise en cause fondée sur des raccourcis trompeurs.
Certains accidents sont à la fois la faute de tout le monde et la faute de personne. Celui-ci, en tout cas, n’est pas la faute de Grégoire CHASSAING.
Je sais que cela est difficile à entendre pour certains, parce que l’émotion absolument légitime dans cette affaire peut être aveuglante, et parce que nous vivons dans une société animée d’une soif perpétuelle de trouver des coupables en toutes choses.
C’est difficile à entendre, qu’il n’y ait pas de responsable pénal, mais cela n’en reste pas moins la vérité.
La Justice pénale, dans un Etat de Droit, n’est pas un terrain de spéculations, mais au contraire de haute exigence probatoire.
Et en l’état du dossier, il est impossible de prouver un lien de causalité certain entre le décès de Steve MAIA CANICO et une faute caractérisée qui aurait été commise par mon client.
En effet, avant 4 heures 33 minutes et 14 secondes, moment exact de la chute de Steve MAIA CANICO dans la Loire , tout au plus 2 ou 3 grenades lacrymogènes de type MP7 ont été envoyées par 2 policiers sur le bunker depuis lequel des casseurs, extérieurs au milieu électro (certains d’entre eux cagoulés), les inondaient de projectiles tels que des bouteilles de verres, des parpaings ou encore des pavés. C’est donc en riposte à un caillassage extrêmement violent que certains policiers se sont défendus. Non protégés par leurs équipements, pris par surprise et craignant pour leur intégrité physique très gravement menacée, ces policiers ont réagi en état de légitime défense, de leur propre initiative personnelle et sans consigne de la part du commissaire Chassaing.
Ni cet emploi de moyens lacrymogènes limité, légitime, nécessaire et proportionné vers 4h31 ni les déplacements des effectifs de police autour du bunker ne constituent des fautes caractérisées imputables à Grégoire CHASSAING.
Je vous rappelle soit dit en passant qu’aucune charge policière n’a jamais eu lieu, encore moins vers la Loire, et je vous invite donc à arrêter de véhiculer cette idée fausse qui travestit cette affaire depuis le départ.
Je me dois également de rappeler que d’un point de vue purement juridique, tous les évènements intervenus après la chute en Loire de M. Steve MAIA CANICO à 4 heures 33 minutes et 14 secondes sont hors sujet ! Je pense à l’emploi très important d’armes intermédiaires par la police, en particulier la deuxième salve lacrymogène de 4h34 ; je pense au nuage de gaz lacrymogène qui a envahi et saturé le quai et créé un mouvement de foule ; je pense à l’interpellation d’un individu près du bunker ; et j’en passe… Tous ces faits postérieurs sont autant de facteurs non contributifs de l’accident qui doivent être évacués du raisonnement pour apprécier correctement le délit d’homicide involontaire reproché à mon client.
Et ceux d’entre vous qui assisteront à l’audience constateront que ce qu’il reste dans ce dossier, après un tel tri chronologique, c’est le vide sur le plan de la culpabilité pénale.
Alors que tous les autres acteurs et décideurs ont été progressivement dédouanés par la justice – en particulier les personnes responsables de l’absence injustifiable de barrièrage sur le quai Wilson – l’on a focalisé, à dessein, le rouleau compresseur judiciaire sur le commissaire de police présent sur le terrain …. sans doute par facilité, et parce qu’il fallait bien un procès.
C’est pour cette raison que j’ai décrit il y a quelques mois Grégoire CHASSAING comme étant le fusible idéal de cette procédure. Je persiste et signe.
Et cette stratégie a été d’autant plus facile pour le Parquet et les juges d’instruction que la messe était dite, l’affaire était entendue pour une frange militante de l’opinion publique, qui avait déjà un avis tout fait sur la culpabilité du commissaire sans connaître la réalité du dossier, ou en n’en connaissant qu’une partie tronquée, dénaturée et instrumentalisée à d’autres fins que celle de la recherche de la vérité.
Mais le temps est désormais venu pour la Défense de mettre fin à cette cabale médiatique lancée contre Grégoire Chassaing sur la base d’une vision exclusivement à charge et à sens unique répandue dans la presse et sur les réseaux sociaux.
J’espère donc qu’une vertu de ce procès sera de permettre à la Défense d’être enfin entendue et écoutée, dans l’analyse minutieuse des faits, et rien que des faits, et par une application stricte du droit en matière d’homicide involontaire, qui est le même pour tout justiciable, commissaire de police ou non.
Alors vous vous demandez comment il appréhende ce procès.
Et bien malgré l’immense pression qui pèse sur lui, comme vous pouvez vous en douter, il garde tout de même, avec humilité, un état d’esprit combatif, et confiant dans l’institution judiciaire.
Nous souhaitons du fond du cœur, dans l’intérêt de tous, que l’audience à Rennes soit sereine, digne, factuelle et juridique, loin du procès d’intention qui n’a que trop duré depuis 5 ans.
Vous savez qu’il n’appartient pas à la Défense de démontrer son innocence mais que c’est à l’accusation de prouver la culpabilité.
Pour autant, cela ne nous empêchera pas, nous Défense, de tout faire pour participer à la manifestation de la vérité, en éclaircissant les nombreuses zones d’ombres persistantes par un travail d’analyse exhaustif et méticuleux des faits, comme nous l’avons fait à l’instruction.
Ce procès sera une épreuve libératrice pour Grégoire Chassaing, une délivrance je l’espère, mais ce qui est sûr… c’est qu’il y fera face avec toute la dignité, la franchise, le sens des responsabilités et la quête de la vérité qui caractérisent ce fonctionnaire de police de très haute valeur.
Mon client est un homme qui assume ses erreurs et ne se défausse jamais.
Sa personnalité et son parcours exemplaires font l’admiration de ses proches et de l’institution policière, en particulier le corps des commissaires, qui tous s’identifient à ce qu’il a vécu le 22 juin 2019 et à ce qu’il traverse depuis lors.
Il bénéficie de la pleine confiance et du soutien total de sa chaîne hiérarchique jusqu’au plus haut niveau.
Il n’a jamais prétendu avoir effectué une gestion irréprochable de ce service d’ordre, qui a été le plus difficile qu’il a eu à gérer de toute sa carrière aguerrie et immaculée.
Le 22 juin 2019 avant 4 heures 33 minutes et 14 secondes, le commissaire CHASSAING a tout simplement fait du mieux qu’il a pu.
Il n’a commis aucune faute caractérisée, et n’a en tout cas pas causé, même indirectement, la mort de Steve MAIA CANICO.
Condamner un innocent ne réparera jamais ce funeste accident.
Je vous remercie. »